mardi 19 avril 2016

Hollande hors jeu ?

 

 
 
Ne comptez pas sur moi pour jouer au jeu risqué des pronostics.
 
A 13 mois de la future élection présidentielle, l'expérience montre de manière trop flagrante que l'on ne peut savoir qui sera l'heureux élu. En 1994, qui donnait Jacques Chirac contre Balladur ? en 2011, qui pensait que l'obscur Hollande allait décrocher la timbale face à DSK ? à l'étranger, qui tablait sur large victoire des conservateurs au Royaume-Uni, reconduisant Cameron au 10 Downing street ? qui, il y a un an, prévoyait qu'un candidat aux primaires aussi folklorique que Trump serait aujourd'hui le favori républicain ? etc...Le champ des éventualités est tel, et les imprévus si innombrables dans une campagne présidentielle, que nul ne peut raisonnablement émettre un son pour déterminer à qui sera confié le sort du pays en 2017.
 
Or, on perçoit sur les ondes et dans les gazettes, à droite comme à gauche,  une  antienne de moins en moins sourde, qui annone que François Hollande n'a aucune chance d'être réélu (voir par exemple le récent (et trés bon dans la forme) article de Georges Michel " Le dernier clou du cercueil", sur Boulevard Voltaire). Et bien je voudrais jeter à bas une telle certitude, au risque de décevoir et d'effrayer le lecteur.
 
Elle repose avant tout sur l'extraordinaire impopularité de l'actuel locataire de l'Elysée. Cet argument ne saurait prospérer. D'abord, parce que cette impopularité est mesurée par des sondages, dont chacun sait à quel point ils peuvent être manipulés et versatiles. Ensuite, parce que des sondages bas n'ont jamais empéché aucun homme politique de se représenter, du moins s'il se découvre l'envie de rempiler. Et l'impopularité, un an avant l'élection, n'est pas comparable à l'acte civique qui consiste à déposer un bulletin dans l'urne un  an après. De manière consciente ou pas, l'électeur ne fait pas jouer les mêmes mécanismes psychiques dans un cas comme dans l'autre. Il est vrai qu'en 2012, Sarkozy n'a pu surmonter ce handicap, mais ce contre-exemple ne peut à lui seul suffir à démontrer l'inanité du principe.
 
Et puis, il faut se mettre en garde contre le risque classique qui consiste à sous-estimer celui que l'on méprise. Si François Hollande est un exécrable président, il est un candidat plutôt bon. Il ne doit pas seulement sa victoire de 2012 à l'impopularité de son prédecesseur et au forfait de DSK. Il a su avec une certaine rouerie gravir les échelons qui l'on mené à la tête de l'Etat. Ce n'est du reste pas une surprise : cet homme est un apparachik. Or , un apparachik, ça ne sait pas faire grand-chose, sinon intriguer et gagner des élections. Mais ça, il a montré savoir le faire. En d'autres termes, François Hollande est un stratège minable mais un tacticien correct. Méfiance.
 
En outre, si l'on regarde la gauche socialiste, qui pourrait être crédible face à lui ? Valls ? trop marqué par son passage à Matignon. Aubry ? n'a pas l'air d'avoir envie. Montebourg ? trop fantasque. Macron ? trop inexpérimenté ( même si Hollande fait tout pour qu'il perturbe la popularité de Valls, tiens, tiens,...). DSK ? soyons sérieux. Ayrault ? trop terne. Fabius ? casé au conseil constit. par Hollande ( tiens, tiens,...), Najat ? je plaisante. Royal ? déjà vue, etc...Par élimination, François Hollande conserve de bonnes chances d'être choisi par les primaires de la gauche. Conservons cette hypothèse.
 
Et regardons maintenant le mécanisme politique mis au point par François Mitterrand autrefois, qui n'en finit pas de produire ces effets néfastes, et prenons pour autre hypothèse ( pas plus certaine que l'autre, il est vrai...) que Marine Le Pen figure au deuxième tour. Le candidat PS ou LR qui sera face à elle sera élu à coup sûr. Or, il ne me parait pas du tout acquis qu'il s'agira du candidat LR.
 
En effet, le candidat LR le mieux placé aujourd'hui est Alain Juppé. Si ce dernier s'avère le candidat choisi par LR, la bataille du premier tour se jouera au centre. Or, le centre, c'est connu, est un mystère instable, capable de balancer pour ou contre Hollande, Chirac, Royal, Macron, DSK, Giscard, Balladur, Jospin, Mitterand, Juppé, Valls,  ou n'importe qui au moindre coup de vent. Et personne ne peut savoir qui de Juppé ou de Hollande franchira le cap du premier tour.
 
Et si un autre candidat LR est choisi par la droite, il sera nécessairement plus à droite que Juppé, découvrant le flanc centriste LR/Modem de la droite. Et s'ouvrira alors un boulevard devant François Hollande qui lui permettra aisément de se qualifier pour le deuxième tour.
 
On connait la suite !
 
Alors, que l'on cesse de considérer François Hollande comme hors jeu. Du moins tant qu'il n'annonce pas officiellement renoncer à se présenter.