mardi 30 octobre 2012

Un regard en arrière

"On oublie toujours, ou bien l'on ne veut pas se souvenir, de la hauteur chevaleresque où vivaient ces humains qu'une expansion profonde poussait vers la magnificence. Parce que nous cultivons maintenant les sentiments économes, que nous épargnons les lyrismes, nous diminuons les êtres du passé. Moins d'analyse chez eux que chez nous mais un jaillissement vital qui doit toujours être reconnu si nous voulons les ressusciter. Et qu'on n'imagine pas, ici, un engouement tendancieux : les actes sont là et qui s'imposent. Le don de soi, la bravoure ; l'excès dans le plaisir, dans le bien, dans le mal, ne peut se comprendre sans supposer chez ceux qu'il bouleversait incessamment une ébullition de l'âme et des sens. L'amour à briser les fonçailles du lit, bien sûr, mais aussi à perdre la cervelle. Le duc d'Enghien se trouvait mal de tendresse. M. de Guise qui avait déniaisé Mlle Paulet, la Lionne, en resta plusieurs jours comme égaré..."

La Varende, Les belles esclaves, 1949.

lundi 29 octobre 2012

Une Révolution contre le peuple

"La morgue a changé de sens : la voici chez le peuple. Avec quelle hauteur il reçoit nos hommages intéressés. Avec quelle vanité se targue-t-il de sa noblesse, c'est à dire de son ignorance, de sa sottise, de sa brutalité. Qu'était la liste des pensions nobiliaires près des gratifications consenties à la canaille. Le livre rouge, c'est la Dette. Le peuple se croit de droit divin. On le lui a tellement dit qu'il en est excusable. Quand viendra-t-il le révolutionnaire qui proclamera la mise hors la loi du peuple ?"

La Varende, Ce que je crois, 1953.

"La démocratie ne vit qu'en pressurant le possédant en faveur des privilégiés, de la masse intestinale, du paquet de boyaux ! du prolétaire content de lui qui bouffe et qui chie."

La Varende, Le non de M. Rudel, 1962.

"Quel renversement. Seul l'homme du peuple maintenant est convaincu d'avoir droit au bonheur. Le peuple est devenu une caste, le quart état. Quelle grimace pour ces messieurs du tiers."

"Notre rang ? C'est premièrement d'être généreux, puissant pour venir en aide, décidé pour agir vite et bien ; indifférent un peu pour ne point garder rancune ; courageux pour mourir ... et faire croire aux gens que c'est facile de mourir."

Le même, Le centaure de Dieu, 1938.

mercredi 24 octobre 2012

Garçon, une fine à l'eau !

Qui n'a entendu dans tel film ancien un personnage à la terrasse d'un café réclamer d'une voix gouailleuse une fine à l'eau, que le taulier s'empresse de lui servir sans s'étonner.
Combien parmi nous savent de quelle boisson il s'agit ?Bien peu, surtout parmi les plus jeunes. Et pourtant, c'est bien l'une des production les plus prestigieuse de notre pays qui est ainsi désignée, additionnée d'aqua simplex : J'ai nommé le cognac. Oui, oui, vous lisez bien , j'entends consacrer ce billet à un sujet aussi futile que le cognac !

Parmi les merveilles que notre sol et le travail de nos producteurs ont du engendrer, l'eau de vie de Charente est aujourd'hui bien oubliée des français. Nous avons tous une bouteille poussiéreuse au fond de notre bar que nous ne sortons guère que pour faire la cuisine, ou pour la proposer au cousin de passage qui s'empresse de refuser. Dix ans après son ouverture, elle encombre encore, à peine entamée.

La faute à quoi, à qui ?

Sans doute à l'attrait sans nuance de l'exotisme alcoolique : le whisky lui a taillé des croupières, à mon sens sans raison objective valable. Sans doute aussi à la rigidité traditionnelle des idées mal reçues qui veut que le cognac ne peut dignement s'apprécier qu'en digestif. Or, par les temps qui courent, se boire un Dijo après apéritifs, et vins, c'est le retour en taxi, si taxi il y a...donc, pas de dijo, et pas de cognac.

Le résultat, c'est que la reine des eaux de vie est bue à 97  % à l'étranger, et que les français en viennent à l'ignorer totalement.

Et pourtant, quelle merveille au palais, quels arômes, quel cordial !

Buvons du cognac, pur, avec des glaçons, de l'eau, du Perrier, du schweppes, du jus de letchis, du coca si cela vous chante, mais buvez-en morbleu !!!  Régalez vous en à l'apéritif, à table, en digestif, avec le café, un cigare, faites en un grog les jours froids, mais de grâce, ne l'oubliez pas. Ce breuvage est le compagnon de l'homme ou de la femme de goût.

Laissez les soit-disant puristes qui vous dirons que c'est sacrilège de boire ainsi du cognac. Le seul vrai sacrilège , c'est de ne pas en boire.

Figurez-vous que cet alcool délaissé par les clients de son pays producteur à été adopté par les rappeurs de New-York, sous le vocable "yack". Des rappeurs New Yorkais....

Réagissons, que diable !!!

Alors, comme moi, à la première occasion, réclamez haut et fort : garçon, une fine à l'eau !

N.b.

La culture française est comme le cognac, admirée et appréciée à l'étranger, mais en voie d'extinction dans son pays d'origine.


mardi 16 octobre 2012

On est foutus

"Selon une information révélée par LeBerry.fr reprise par La Croix une église de Vierzon (Cher), qui n’avait plus d’utilité pastorale, a été mise en vente au prix de 170 000 €. Le site du quotidien indique qu’une association marocaine a approché la paroisse avec l’intention de transformer le lieu de culte en mosquée.


Économe du diocèse de Bourges, Patrice Lemaréchal confirme à La Croix qu’une visite a effectivement eu lieu mais qu’aucune promesse de vente n’est encore signée. Conscient que la décision de céder l’église à la communauté musulmane risque de provoquer un émoi, il ajoute qu’une telle vente, encore hypothétique, nécessitera "un accompagnement" et "une réflexion" spécifiques. 

En tout état de cause,"c’est l’évêque qui tranchera", l’association diocésaine étant propriétaire de l’édifice, construit après 1905. "Avec sa nef de 26 mètres de long par 11,30 m de large, pouvant accueillir plus de deux cents personnes, l’église Saint-Eloi a été bâtie dans le quartier de Puits-Berteau en 1955, une époque marquée par une forte croissance de la population", écrit le quotidien catholique. "


Je crois que ça se passe de commentaire. Cette histoire, c'est tout un symbole.

Et non, je ne sais pas pourquoi le texte s'affiche en majuscule. Maintenant, si vous voulez bien m'excuser, je vais aller me cuiter au cidre.

mercredi 10 octobre 2012

Versailles revisité ( conclusion )

Que voulez-vous que je trouve comme conclusion à cette série de billets, sinon le célèbre sonnet de Joachim du Bellay, qui pourrait servir de slogan à tant de réacs.
Allez, à vos marques ! Prêts ! Partez !!!



 France, mère des arts, des armes et des lois ,
Tu m'as nourri longtemps du lait de ta mamelle :
Ores, comme un agneau qui sa nourrice appelle,
Je remplis de ton nom les antres et les bois.

Tu m'as pour enfant avoué quelquefois,
Que ne me répons-tu maintenant, ô cruelle ?
France, France, réponds à ma triste querelle,
Mais nul sinon Écho ne répond à ma voix.

Entre les loups cruels j'erre parmi la plaine,
Je sens venir l'hiver de qui la froide haleine,
D'une tremblante horreur fait hérisser la peau.

Las, tes autres agneaux n'ont faute de pâture,
Ils ne craignent le loup, le vent ni la froidure,
Si ne suis-je pourtant le pire du troupeau.


Versailles revisité (3) : France, mère des lois.


Outre l'émotion, l'intérêt, le plaisir, une visite à Versailles inspire forcément à reconnaître ce qu'il y a de plus intrinsèque dans l'âme française. Regardez le château, observez bien les jardins  : vous verrez la symétrie, l'harmonie, la douceur des couleurs, des formes, des perspectives mais aussi ce que ces bonheurs comportent de rigueur, de choix, de rectitude. Ce que l'équilibre  classique peut coûter d'efforts et de sacrifices ! Quelle souffrances les créateurs de ces splendeurs ont-ils endurés pour y parvenir ?

C'est bien cette ascèse en vue de  l'accord agréable qui a servi de ressort à l'édification de la France.

Portez alors votre regard au-delà, dans le passé et dans l'espace. Vous considèrerez que c'est  ainsi qu'autrefois les lois étaient faites. Pour maintenir et construire l'ensemble commun, même au prix élevé , car seul le résultat à terme compte. 

Ainsi, Louis XIV a révoqué l'Edit de Nantes. Chacun aujourd'hui s'accorde à qualifier  cette décision d'erreur, même parmi ceux dont l'indifférence à la pensée dominante contemporaine est prouvée ( Dimitri Casali, Yvan Rioufol, par exemple ). Pourtant, à y regarder de plus prêt, l'orientation choisie par le Roi Soleil est-elle si absurde et si scandaleuse ?

Les critiques reprochent d'abord à la Révocation de l'Edit de Nantes sont caractère anti-tolérant. Ce point de vue induit que l'Edit de Nantes soit une décision dictée par la tolérance. Or ce terme n'avait pas la même signification à l'époque d'Henri IV ou de Louis XIV, et à la nôtre. Aujourd'hui , nous savons tous ce qu'il signifie , ou nous ne savons plus, mais il n'est nul besoin de développer. Autrefois, il s'agissait de supporter ce que l'on n'aime pas. Henri IV a bien eu raison de mettre fin aux guerres de religions par l'Edit de Nantes. L'a-t-il fait par tolérance ? Non puisque converti au catholicisme pour les besoins de la cause, il ne pouvait pas ne pas aimer  ses anciens coreligionnaires. Il l'a fait parce que les circonstances l'exigeaient pour maintenir l'unité du royaume, à ce moment précis.

 A mon avis, le roi très catholique qu'était Louis XIV, quant à lui, n'était tout de même  pas sot au point de haïr une partie des sujets de son royaume à raison de leurs  convictions religieuses. S' il a pris la décision en cause, ce n'est donc pas par intolérance.

Mais pour d'autres motifs. 

Le souverain à considéré  le principe premier qui gouverne à l'édification du royaume de France : ce qui fait l'unité de ses peuples, c'est la Couronne  et la religion catholique . Par conséquent, le présence sur le territoire de fidèles protestants actifs, laborieux et intelligents constitue pour le présent et surtout à  terme une menace centrifuge qu'il convient de prévenir. Ils ont été nombreux à lui reprocher cette analyse, Vauban en tête. Mais le même principe qui avait dicté à son prédécesseur de prendre acte en un sens, lui imposait d'en prendre un dans l'autre sens.

Le roi et Colbert ignoraient-il le coût de cette sanction ? Je l'ignore, mais j'ai peine à le croire. La fuite d'une partie des protestants qui suivi la Révocation de l'Edit de Nantes a sans aucun doute été une épreuve pour le pays ( d'autant que les descendants de certains sont devenus d'excellents viticulteurs et rugbyman ...en Afrique du Sud). La persécution plus ou moins  larvée qui suivi ( dragonnades, révolte des camisards ...) une plaie lancinante dont se sont nourris les philosophes des Lumières, non sans arguments valables.

Je prétends pour ma part que cette révocation fut douloureuse pour ce roi, qui ne s'y est résolu que convaincu de sa nécessité impérative ( et non sous la pression des "lobbys" catholiques, dont il devait bien se moquer intérieurement).

Mais que se serait-il passé si l'Edit de Nantes avait été maintenu ? les protestants se  seraient -ils contentés des strapontins nationaux accordés par Henri IV ? Seraient-ils restés loyaux à un roi au mieux indifférent à leur revendications ? Auraient -ils été tentés par la trahison comme par le passé ? Nul ne le saura jamais. Et tant mieux,  grâce à la révocation de l'Edit de Nantes.

Et puis, si vous n'ètes pas convaincus par mes arguments décisifs, n'oubliez pas que Louis XIV avait   l'excuse de ne pas connaître le rugby.

Voilà une illustration de décision difficile, contestable, contestée, et pourtant prise, dans l'idée de maintenir, de cultiver l'unité Française, fusse au prix le plus fort.

Veuillez maintenant comparer avec le spectacle politique que nous avons sous les yeux. Faut-il vraiment décrire l'état  de décrépitude qui prévaut à la façon dont nos lois sont décidées ? D'abord elles sont pour certaines convenues ailleurs qu'en France. Ensuite, quant une autorité nationale est par hasard compétente, elle agit pour déliter un peu plus ce qui constitue l'ossature historique de notre pays :

-formellement : par une multiplication de textes anarchiques sur tous les  sujets y compris  hors du champs public, y compris sur le terrain pénal.

-sur le fond : par un laissez aller et un laxisme au mieux profitable à court terme, mais suicidaire à moyen terme avec certitude.

Sans la rectitude classique qui la caractérise, à l'image de l'architecture du château  de Versailles, la France s'enfonce au fil des décennies dans une identité qui n'est plus la sienne et qui la détruit aussi sûrement qu'un cancer porte à sa perte  l'organisme qu'il envahit. Elle s'éloigne de la sorte de son idéal harmonieux et devient une sorte de vitrine officielle du chaos bien loin de l'équilibre exigeant qui fait pourtant son génie.

Le soucis rigoureux et  raisonné de clarté à laissé la place au bordel émollient. La France ne peut y survivre. Elle n'est plus la fille aînée de l'Eglise. Elle n'est plus mère des lois. Elle n'est plus mère des arts.Elle n'est plus mère des armes. Elle n'est plus grand chose à vrai dire, sinon un endroit un peu moins désagréable que d'autres parce que les châteaux y sont beaux, les vins goûteux, les ballons de rugby ovales, la cuisine savoureuse, et les hommes politiques risibles ( et on n'a pas tant que ça de sujets de rigolade).

Mais enfin, si Louis XIV revenait , je suppose qu'il serait un peu mélancolique. Et qu'il prendrait une bonne dose de Prozac.



















dimanche 7 octobre 2012

On doit mériter la vie.

"Cette façon paternelle, ou fraternelle, que la classe ouvrière a mise au ban, qu'elle dénonce chaque jour comme une des manoeuvres les plus basses et les plus hypocrites de la réaction, des capitalistes des trois sortes, ceux de l'argent, de la tête et du coeur. Aujourd'hui don Bosco plierait sous les sarcasmes et l'injure [...] Pour les gens de gauche, le paternalisme est un masque de brave homme sur un visage de traître [...] Triste de ne plus avoir le droit d'aimer le peuple, sans rien, rien espérer, d'ailleurs, avec une grandeur de caste consciente. Rien à faire, le sourire amical serait pire qu'une mornifle. Tout le mal vient de cette affirmation : le droit à la vie, ce slogan de haine et de revendication, si physiologiquement faux. On doit mériter la vie. Toutes les espèces luttent et les meilleures seules persistent.
          Il est incroyable qu'une idée si haute, certainement d'origine chrétienne, celle de l'égalité à tout prix, si noble dans ses prémisses, ait donné des conclusion aussi délétères. Il faut savoir, pour comprendre, qu'elle a été privée de son élément intime, de sa charité, et en somme, de Dieu. Le christianisme est UN. Le semi-christianisme est pire que le paganisme."

Jean de La Varende, cité par Anne Brassié dans La Varende, pour Dieu et le Roi, 1993.