mardi 7 octobre 2014

Il est trop tard pour réfléchir.



Au risque d’étonner les lecteurs, décidément, j’aime bien l’émission « On n’est pas couchés » de Laurent Ruquier. 

Mais certainement pas pour des raisons que ses auteurs apprécieraient. Il est patent que l'on n’y apprend rien d’intéressant sur le fond. Ce qui n'y est pas dit, en revanche, est tout à fait digne d’intérêt. Les silences, les réactions de l’animateur, des chroniqueurs, des invités et du public renseignent beaucoup sur les lacunes de la pensée dominante.

Samedi soir, Léa Massalé, chroniqueuse, questionnait Eric Zemmour sur son dernier ouvrage. Les échanges se sont focalisés sur Vichy. Le trublion réactionnaire soutenait en substance que Vichy avait « sauvé des juifs français», mais en acceptant de livrer les étrangers. Scandale dans l’assistance, s’en était trop. Tenir de tels propos relevait selon la charmante Léa d’une entreprise quasi-blasphématoire de réhabilitation de l’État français.

Pourtant, chiffres incontestables à l’appui, il apparaît que la réalité historique plaide en faveur de la vision de Zemmour. Notez d’ailleurs, qu’à aucun moment cet admirateur du général de Gaulle n’a soutenu que Vichy ne fût pas antisémite, ou qu’il fût antisémite sous la seule contrainte de l’occupant, ou qu’il fallait absoudre le pétainisme de ses crimes, ou quoique ce soit de cet ordre. 

Je ne suis sur le fond du reste pas tout à fait sur la même longueur d’onde que lui : j’ai peine à croire que le but de Vichy ait été de « sauver de juifs », et que par conséquent il l’ait fait par choix politique. Mais il est à mes  yeux crédible que Vichy ait cherché à affirmer son peu d’autorité vis-à-vis de Hitler sur ce point, en freinant les ardeurs antisémites des nazis à l’égard des français, en particulier en zone « nono », du moins tant qu’il y a eu une zone « nono ». Il est également possible que puisque nombre de juifs étaient anciens combattants de la première guerre mondiale, leurs camarades vichystes aient cherchés à les protéger, eux et leurs familles. Ce ne sont bien sûr que des hypothèses personnelles à passer au crible des faits et de l’analyse historique. 

Quoiqu’il en soit, plutôt que de crier haro sur le baudet Zemmour, il aurait été plus utile à une saine réflexion de se poser ce genre de questions. Mais ce ne fut naturellement pas le cas. 

Une anecdote personnelle pour illustrer la véracité du propos d’Eric Zemmour : j’ai comme voisine une charmante dame très âgée. Elle parle parfaitement le français, mais avec un fort accent des pays de l’Est. A l’automne, elle nous offre toujours des noisettes de son jardin. La première fois que nous sommes allés prendre l’apéritif chez elle, après avoir parlé de choses et d’autres, elle nous raconte être arrivée en France en 1945, venant de Biélorussie. Très fin comme à mon habitude, je lui demande pourquoi. Elle élude. Je regarde autour de moi. Manifestement, aux objets judaïques ornant son salon, notre voisine est juive. Lorsque l’on sait le sort réservé aux juifs sur ces « Terres de sang », il n’était pas utile d’avoir la maladresse de poser des questions… Cette dame et son mari ayant survécu, je ne saurais jamais comment, ils ont choisis de quitter leur pays d’origine pour s’installer en France et refaire leur vie. Ils ont créé de rien, par  leur seul travail, une entreprise devenue prospère dans la région et que notre voisine continue de surveiller du coin de l’œil !…

Peut-on même imaginer que ce couple intelligent et lucide ait pu prendre le risque d’opter pour  un pays au passé brutalement antisémite, après les épreuves qu’ils ont dû traverser pour fuir les nazis puis l’URSS ?
En rapprochant ce que dit Zemmour et le témoignage (en non-dit) de cette dame, on comprend que ce qui s’est passé pendant l’occupation en France ne peut se résumer en un jugement lapidaire. Cela réclame nuance, prudence, rigueur, lucidité et une certaine forme de courage intellectuel.

Ce sont là les conditions d’une vision authentiquement humaniste. Exactement le contraire de ce qu’on a vu et entendu chez Ruquier samedi soir. Ce refus de toute réflexion, et pas seulement en raison de l'heure tardive, sur ce sujet comme sur tous les autres, permet de comprendre pourquoi nous en sommes arrivés où nous en sommes. Ce n’est certes pas une découverte, je vous l’accorde.

Mais voilà pourquoi j’aime bien cette émission. Car après tout, Ruquier a peut-être raison : On n'est certes pas couché, mais il est trop tard pour réfléchir.

jeudi 25 septembre 2014

Partageons nos comparaisons.



La fin tragique de notre compatriote Hervé Bourdel semble faire perdre leurs moyens à nos amis de gauche. Dans un billet  sur ce sujet, un blogueur réactionnaire, que nous appellerons Maltese, a demandé que les musulmans de France expriment sans détour leur rejet de tels actes.

C'est dans ce contexte qu'un blogueur de gouvernement a cru bon de le contredire, après quelques amabilités à son égard. A l'appui de son propos, il a imaginé une subtile comparaison. 

Imaginons, écrit-il en substance, qu'un gros frisé japonais vienne à sodomiser un écureuil. Viendrait-on alors me demander à moi, qui suis gros et frisé et français (nous dit-il) ce que j'en pense ? Non, n'est-ce pas ? Alors, n'apostrophons pas les musulmans de France pour ce que leurs coreligionnaires ont fait en Algérie.

Or, ce parallèle loin d'affermir le propos de son auteur, le réduit presque à néant, par sa faiblesse même.

En effet, il nest pas venu à lesprit de notre raisonneur quil est assez exceptionnel que les sodomiseurs d’écureuil justifient leurs actes par la circonférence de leur ventre, ou londulation de leur chevelure. Dès lors, il est exact quil ny a aucune utilité à demander aux autres gros et frisés, japonais ou pas, ce quils pensent du comportement zoophile de celui qui leur ressemble physiquement.

Mais, sagissant de lassassinat dHervé Bourdel, ses meurtriers motivent leur forfait par lislam. Il se trouve que les musulmans de France sen réclament également. Il y a donc un fondement identique à des comportements que l'on souhaite différents. Par conséquent, il tout de même justifié de se tourner vers ces derniers pour leur demander ce quils en pensent, et despérer une réponse satisfaisante.

Tentons une autre comparaison, pertinente, cette fois.

Supposons quun groupe de catholique fanatique (!), enlève le premier randonneur musulman venu et labatte froidement en raison de sa religion.  On demanderait immédiatement aux catholiques français (sans parler du pape) de prendre position sur de tels agissements. Et on ne se contenterait pas en réponse de simples afflictions de principe. On aurait raison.

Et bien ce qui vaut pour les catholiques, vaut pour les musulmans.

Dailleurs, les autorités musulmanes françaises viennent de donner raison à Maltese en appelant à une manifestation demain à Paris. Nous verrons bien ce quil en adviendra.

Jignore si le blogueur de gauche susdit est gros, mais la lourdeur de son propos laisse tout de même un peu pantois.

lundi 22 septembre 2014

Vacances à Mossoul


Or donc l'EI, dans le style si cordial qui le caractérise, a déclaré ce matin la guerre sainte contre la France et incité ses affidés  à occire par tous moyens nos compatriotes "sales et méchants". Bien entendu, cet appel ne vise pas les français qui ont comme projet de passer leurs congés dans leurs rangs. Ce n'est pas précisé dans le communiqué, mais même un esprit moyen comme le mien l'a compris.

Car  il apparaît que nombre d'habitants de la Creuse et des autres départements français s'inscrivent avec un enthousiasme assez touchant à des stages de djihâdisme approfondi organisés du côté de Mossoul. Ils pourront en olinclousive goûter aux délices d'un séjour rustique et proche des indigènes.

Les organisateurs leurs offriront l'opportunité de s'initier aux plaisirs pittoresques de la décapitation en rase campagne, de la crucifixion comme au bon vieux temps,  et de l'endoctrinement à haute-dose façon démocratie populaire. Chacun pourra même, si les circonstances le permettent ( sans garantie de la direction ), violer pépère une jeune chrétienne avant de l'éventrer. Aux derniers réticents à un programme pourtant exaltant, Deash propose gratuit un kami et un billet d'absence chez le raseur du coin.

Et il se trouve des esprits chagrins,  du côté du gouvernement français, pour tenter d'empêcher une entreprise aussi  aimable !

Chez nous, chacun est libre de ses opinions politiques, religieuses et spirituelles et même de préférer l'Irak ou la Syrie à Argelés-sur-mer.

Alors, au nom de quel principe républicain empêcher un français de retenir le califat comme villégiature?

Bien plus, puisque les occidentaux manquent un peu d'idéal spirituel, il convient d'encourager ceux qui ont trouvé le leur. Alors, foin d'avarice : offrons à ces volontaires leur billet d'avion pour le Daesh.

Allons même un peu plus loin , aidons-les contre eux-mêmes. Empêchons-les de renoncer ou de changer d'avis, ce ne serait pas leur rendre service. Prolongeons leurs vacances de manière indéterminée, interdisons-leur de rentrer dans notre pays ! C'est pour leur bien !

Aussi, avec la meilleure volonté  du monde, je ne comprend rien, mais alors rien, à la politique du gouvernement qui fait exactement le contraire.

mercredi 17 septembre 2014

Hippocrate : le mal français.






Il est sorti récemment sur les grands écrans un film français intitulé « Hippocrate » qui décrit l’initiation d’un jeune interne à la dure vie de l’hôpital dans lequel il est affecté, au sein du service dirigé par son propre père. On sort de la salle obscure pour le moins secoué,  plus mal en point que l’on y est entré, ce qui est tout de même un comble. Certes, depuis Molière et Knock, on est habitué à ce que les médecins imaginaires fassent plus de mal que bien. Les séries hospitalières américaines (Urgences, Grey’s anatomy,…) nous ont également préparé à la dramaturgie qui est censée se jouer entre les quatre murs de nos cliniques.

Avec Hippocrate, c’est autre chose. On est en France, et aujourd’hui. C’est le réel que propose de décrire le réalisateur, médecin lui-même. Il y a donc un sens,  au-delà des joies et drames personnels qui y sont décrits. 

Le film est assez bien réalisé, du moins jusqu’à ses dernières minutes, l’interprétation est à la hauteur, et le spectateur se prend assez vite aux intrigues et états d’âmes qui saisissent les différents personnages. Mais les choses se gâtent dès qu’il s’agit d’aborder les questions plus générales, voire, disons le, plus politiques. Et c’est ce glissement-là qui ne passe pas. 

Nous évoquerons rapidement un des aspects capitaux que tente de révéler Hippocrate : le rôle joué au sein des hôpitaux par les médecins étrangers. Il n’y a qu’eux finalement pour introduire un peu d’humanité, de souplesse, d’écoute et de professionnalisme parmi un personnel français présenté comme froid, malhonnête, flemmard, incompétent  et volontiers alcoolique. On peut se demander si cette présentation pour le moins surprenante est consciente de la part du réalisateur. Quoiqu’il en soit, elle commence à instiller au goutte-à-goutte un malaise diffus et pernicieux.

Les dernières minutes du film, sans doute bâclées,  révèlent alors ce qui se cache dans le cerveau de son auteur, mieux encore qu’une IRM. Voilà le directeur de l’hôpital, seul à ne pas porter de blouse blanche et donc évidemment incapable, et le chef de service père du personnage principal, frappés de mutisme, alors qu’ ils sont violemment pris à partie par leur personnel dans sorte d’AG improvisée. Les invectives, les reproches, les frustrations, tout fuse dans le désordre. Ce n’est que revendications et éructations syndicales. Il n’en sortira rien. Générique.

Il n’en sort rien, donc, de ce film, sinon le souvenir consternant d’une scène de beuverie des internes, dansant et hurlant la douleur de soigner les autres jusqu’à l’épuisement. Sinon l’image d’une relation père-fils viciée par le comportement présenté comme délétère du premier qui n’a pourtant cherché qu’à protéger le deuxième, comme il le fait pour tout son personnel. Et une critique nauséeuse de plus de ce que notre pays produit de mal, forcément mal (il est bien démontré qu’en France, on est plus mal soigné qu’ailleurs). 

Rentré chez moi, j’ai pris un cachet.

mercredi 27 août 2014

La Gauche contre la Cinquième République.






Parmi les récents évènements qui animent la rentrée politique, ce qui me frappe par-dessus tout, c’est l’entêtement d’une partie la Gauche à vouloir « débattre » et si possible « re-débattre » du sujet économique. Ainsi donc, les « frondeurs » reprochent au chef de l’Etat et à son Premier ministre de manquer à un devoir de dialogue et d’écoute à leurs arguments. Qu’auraient-ils du donc faire ?

Déclencher un débat parlementaire pour constater l’état lamentable de l’économie française ? on n’en voit pas la nécessité ni la finalité. Ce débat a déjà été mené, et même en-dehors des hémicycles  lors de la campagne présidentielle. Parler des mesures à prendre pour remédier aux difficultés du pays ? Très bien, mais ce sera le cas lorsque le nouveau gouvernement se présentera devant l’Assemblée Nationale. Pérorer à n’en plus finir sur la place de la finance dans l’économie, sur la place de la France dans l’Europe, sur la politique économique de l’Allemagne ? Il faudrait sans doute ergoter, jaboter, jacasser et finalement laisser l’exécutif trancher alors qu'il l'a déjà fait.

Ce désir de débat jamais assouvi est une tendance ancienne et permanente de la Gauche française, qui, au fond, n’a jamais fait le deuil du régime d’assemblée qu’elle préfère.  Elle n’a pas accepté les institutions de la Cinquième République, qui avait pour projet , plutôt réussi,  de maintenir le Parlement à sa place.
On aurait pourtant pu le croire un temps, à l’arrivée de François Mitterrand au pouvoir en 1981. De mauvais esprits avaient alors souligné que l’auteur du « Coup d’Etat permanent » se coulait bien dans les institutions qu’il dénonçait ardemment 20 ans plus tôt. Certains en déduisaient que la Gauche, du fait de l’alternance, avait enfin admis les ressorts institutionnels voulus par le Général. 

Erreur !

C’est de l’intérieur, et sur le long terme, que la Gauche a entrepris de saper les équilibres du texte de 1958, avec l'aide de la fausse droite. Bien sûr, l’initiative en revient à François Mitterrand. Ses successeurs n’ont cessé de poursuivre sur cette voie, y compris Jacques Chirac, qui a porté deux  coups fatals : le quinquennat et la dissolution. Le but sournois étant 1-d’abaisser l’autorité de l’exécutif 2- de rehausser celui du Parlement.

Mais avec l’actuel chef de l’Etat, on augmente encore le taux de perversité et on minore le talent. 

On lui reprochera d'abord son physique, qui évoque  celui des badernes rad-soc de la Troisième. Bon, il n'y est pour rien. Mais de vouloir être normal, ça, c'est vraiment son choix, et il est très malencontreux, surtout lorsqu'il s'exprime par des frasques sentimentales grotesques. S'être en outre laissé humilié, et la France avec, par une Léonarda de 15 ans, on n'imagine pas cela ni de de Gaulle, ni de Pompidou, ni de Mitterrand lui-même...

Jusqu’aux derniers soubresauts, puisque récemment des ministres ont osé sans vergogne exprimer leur désaccord sur les orientations économiques du Gouvernement. Cela aurait simplement justifié une démission (provoquée ou pas) des intéressés, si le Chef de l’Etat disposait encore d’un peu d’autorité. Un ministre, ça ferme sa gueule ou ça démissionne. Non, c’est le Gouvernement qui a démissionné, déclenchant un crise politique et donnant à cette affaire un tour très Quatrième  République.

Et les partants, tout heureux de leur mauvais coup contre la Cinquième république, de réclamer haut et fort un débat. Qu’il ait lieu au sein des partis concernés, pourquoi pas, les français s’en moquent. Mais la politique de la France ne se fait pas au PS, ou au Front de Gauche ou chez EELV.  Elle se fait au sein de l’Exécutif.

En France, Il faudrait parler moins et agir plus, et non le contraire. N’en déplaise aux promoteurs d’une Sixième République, dont le chef de file n’est autre…qu’Arnaud Montebourg !...